Cinéma > Critiques de Films > Failan



C'est un grand jour mes amis, en ce 16 janvier 2003, nous avons franchi "un pas de géant" dans l'histoire du cinéma. Vous ne pouvez pas imaginer à quel point! D'ailleurs, j'en reviens toujours pas, ce que je viens de vivre est tout bonnement monumental. En effet, je viens à peine de sortir du cinéma donc ne m'en veuillez pas si mon texte vous paraît quelque peu sentimental. Pour la simple et bonne raison que FAILAN l'est profondément. Sur le moment, "Triste" et "Emouvant" sont les deux seuls qualificatifs qui me viennent à l'esprit. En tout cas, il aura fallu patienter un long moment avant que je ne me décide à reprendre la plume et cela, je le dois notamment à cette perle, qui a su m'offrir un tel ravissement, une remise en question, non personnelle je vous rassure mais plutôt destinée aux (peu) de films qui rendent le 7 éme art aussi intéressant et original, de part leurs recherches poussées vers l'inconnu. De nos jours, le cinéma coréen est en plein essor et en grande majorité, les réalisateurs nous servent des oeuvres totalement différentes de ce que l'on a pu voir jusqu'à maintenant. FAILAN ne déroge pas à la règle et toute l'ampleur fondée sur mes dires prend ici tout son sens. Vous l'aurez donc compris, les bourrins sans coeur -même si de mon côté, je ne me prive jamais d'un film qui déblaye bien la gueule (oui, je suis un peu barbare sur les bords) genre versus- ne trouveront pas leur bonheur ici. Mais avant de nous lancer dans le vif du sujet, voici un petit rappel de l'histoire et de son inspiration.


La violente scène de meurtre, l'un des éléments déclencheurs

A sa sortie de prison, Lee Kangjae (interprété par le talentueux choi min chik), un gangster notoire, n'a plus aucun repère. D'une nature un peu naïve, il se voit très souvent confronté à de nombreuses querelles qui l'opposent à ses anciens potes de gangs et au mépris de son boss, Yong sik. Pour regagner le respect de ce dernier, Lee accepte de le couvrir dans une affaire de meurtre en lui promettant de se rendre à la police dans les plus brefs délais. En contrepartie, Yong sik lui offrirait un bateau (en plus du respect ^^), ce qui permettrait à lee de rejoindre sa famille résidant dans un village de pêcheur... mais les choses se compliquent quand lee apprend la mort de sa femme, failan, avec qui il avait contracté un mariage blanc en échange d'une modique somme d'argent...

Adapté de la nouvelle de Jiro asada, "lettre d'amour", Failan a fait l'objet de plusieurs modifications, tout du moins dans son contexte. Song Hye sung, le réalisateur, avoue avoir volontairement changé certains aspects de la nouvelle pour pouvoir y ajouter sa propre interprétation de la vie, ce qu'il pense de l'amour de la réalité et de la société (pour citer ses propres termes).

Failan est donc une oeuvre totalement personnelle, sorti de l'imagination débordante d'un seul homme. Mais encore faut-il savoir l'interpréter. Beaucoup de messages se dégagent de ce film, s'adressant d'une part aux téléspectateurs et d'autre part aux divers personnages du film. Failan entre autre (interprété par Cecilia cheung, également vu dans shaolin soccer), une pauvre immigrée chinoise croyant que la Corée serait un excellent moyen de fuir la (sa) réalité. Malheureusement, cela n'y changera rien car souffrant d'une grave maladie, elle devra succomber à l'inévitable. On ne peut échapper à son destin, c'est un fait (ceux qui au contraire pensent le contrôler sont à mes yeux bien pathétiques, désolé). Failan a vécu dans la pauvreté et elle en est morte. Cependant, elle aura ressenti à travers kang jae de grands moments de bonheur et réciproquement. Car en réalité, ces deux personnages ne sont pas si différents que cela et j'irai même jusqu'à dire qu’ils se complètent parfaitement. Le véritable amour en somme. Un amour qui ne pourra s'embellir que dans la mort, celle de deux êtres qui s'aiment profondément. C'est triste mais c'est la seule alternative possible.


Il lui cherche des noises...ça va mal finir!

L'amour, ça peut également changer (radicalement) un homme. Kang jae, qui au départ ne se soucie de personne si ce n'est de lui même va enfin se révéler quand il va soudain apprendre la mort d'une inconnue. Dans la première partie, à considérer davantage comme une présentation de personnages, cela va lui être d'une indifférence que seul le temps aura le pouvoir de changer. Au fil du film, il va apprendre à la connaître mais il se rendra vite compte que c'est trop tard, que le mal est fait et qu'il ne pourra plus revenir en arrière. Son seul réconfort sera ces lettres, que failan aura écrit avec difficulté étant donné qu'elle ne maîtrisait pas totalement la langue du pays mais qui seront ampli d'une véritable dévotion en la personne de kangjae. Cette admiration dont il ne serait jamais douté. A noter qu'à aucun moment du film ils ne se rencontrent ni même n'échangent un regard quelqu'il soit.


Se connaître sans jamais se voir

Des flash-back, procédés ô combien intéressant à la bonne compréhension de l'intrigue, nous aident à mieux cerner certains passages, tels que les événements indirects provoqués par notre gentil balourd (dans le bon sens du terme car kang jae me fait plutôt penser à un nounours grincheux mais tout de même très attachant) qui ont donné à failan une profonde reconnaissance, comme l'en témoigne cette scène où kang jae lit l'une des lettres de failan où il est écrit : "Sur votre visage (en parlant de sa photo), vous souriez tout le temps donc vous devez être très gentil." Termes qu'elle répétera souvent comme la fois où elle dit : "Vous êtes le plus gentil du monde, je vous remercie de m'avoir épousée". Des mots qui paraissent totalement inconnus aux oreilles de kang jae, lui qui a toujours été méprisé par les autres. Failan, quant à elle, ne voit aucun mal en lui, le trouvant au contraire bourré de qualités. Quand je parlais de révélation, c'était essentiellement dédié à ce moment du film, qui je dois le dire m'a profondément marqué. Rien que d'en parler, j'en ai les larmes aux yeux...bon, reprenons nos esprits. Voilà:)!
Les flash-back nous montrent également que le destin n'a rien d' "un long fleuve tranquille" (comme le dit le film du même nom). Avant de mourir, failan a tout de même essayé de rencontrer son amour perdu mais sans résultat, le coup du sort en a voulu autrement. Tout ce qu'elle a réussi à obtenir de lui, c'est son écharpe qu'il lui a laissé par l'intermédiaire de son ami, en gage de "cadeau de mariage" et une photo, épinglée sur le contrat de mariage, photo sur laquelle il sourit, tout le contraire du gars bourru et mal rasé que l'on suit tout au long du film.


L'endroit rêvé pour montrer la solitude qui règne chez kang jae

Maintenant, parlons un peu des acteurs à proprement parler. J'ai beaucoup aimé le jeu d'acteur de Cecilia cheung et si il est vrai qu'elle n'est pas très bavarde, elle arrive à tirer sa répartie sur les expressions du visage. Force est de constater que Cecilia a le visage type de la magnificence et en même temps de l'innocence incarnée (je tombe amoureux, sans dec'). Le réalisateur a d'ailleurs souligné que Cecilia était la personne se rapprochant le plus de l'idée qu'il se faisait du personnage de failan, à savoir un visage d'ange et une innocence naturelle.

Quant à Kang jae, magistralement interprété par choi min shik, il nous offre une performance d'acteur bien supérieure à la plupart de ses films (un terroriste dans "shiri" et un peintre ivre de femme^^ dans "ivre de femmes et de peintures"). Il a beau être affublé du statut de gangster, ça ne l'empêche pas de régler ses problèmes dans le calme, quitte à se faire insulter de toutes les bassesses possibles et inimaginables. Sûrement pour se donner de la quiétude, va savoir! Il sait que c'est un bon à rien, enfin, c'est ce qu'on le force à croire pendant la majeure partie du film mais tout au fond de lui, il garde une profonde part d'humanité. D'ailleurs, certaines scènes nous permettent de le constater, comme les fois où Kang jae s'arrête devant une vitrine pour admirer un tableau d'un regard penseur. C'est un signe d'humanité qui nous témoigne de l'espoir qu'a kang jae d'observer la vie d'un nouvel oeil. Et sous son air de vagabond et de rustre, on s'aperçoit qu'il est bien plus humain que la plupart des personnes qui l'entourent.


Magnifique... tout simplement

En fait, on pourrait dire que kang jae est à l'extrême opposé de la personnalité de failan, mais d'un autre côté, c'est ce qui donne à ce couple autant de sincérité d'esprit. Comme on le dit souvent, "les opposés se rejoignent". La seule chose qui va les séparer, c'est le manque flagrant de communication, un problème très présent de nos jours. Pas assez que leur éloignement soit inévitable, les seules occasions où ça leur est possible, une arrière pensée leur en empêche. Pourquoi devons nous nous fier à ce que nous dicte notre conscience? Nos sentiments sont beaucoup plus forts. Ce qui me permet de faire une transition sur l'homme et sa fuite irréversible de ses propres sentiments. Dans failan, comment dire, les émotions sont invisibles pour l'esprit, ils ne s'extériorisent pas. Une incapacité qui devient tout autre quand kang jae, en pleine quête de rédemption, va se rapprocher peu à peu de sa bien aimée. Une approche qui l'affecte profondément et qui, dans son désarroi, lui révéle ce bonheur auquel il n'a pas eu droit, aussi indirectement soit-il. Mais là où le film atteint l'apogée de cette tragédie, c'est quand kang jae part reconnaître le corps de sa femme à la morgue. Il ne l'a jamais vu donc on peut imaginer dans quel état d'esprit il se trouve. Suivi d'une musique magnifique, des flash backs se succèdent jusqu'au moment où tout estomaché qu'il est, kang jae se lève et voit au grand jour ce visage, sans vie... On peut penser qu'à ce moment même, kang jae a subit un traumatisme irréversible, qui s'amplifiera pendant le dernier quart d'heure du film. Un quart d'heure bourré en émotions, où l'on voit la déchéance d'un homme coupé de tout ce qui l'entourait jadis.


Une situation embarrassante et émouvante à la fois

Je ne vais pas vous raconter le dénouement, ce serait impardonnable de ma part mais sachez tout de même que cette fin ne reflète en rien la pensée immédiate qui nous vient à l'esprit lors du générique de fin. De cette façon, j'atteins le but que je m'étais fixé, à savoir de ne pas vous divulguer la fin mais en même temps de pouvoir l'analyser finement. Une fois que vous l'aurez vu, relisez bien ma dernière phrase et vous comprendrez sons sens profond...

Avant de clôturer ma critique, j'aimerai tout de même vous parler de la réalisation, un point essentiel, surtout dans ce genre de film. Les plans de vues sont intelligemment choisis et nous plongent dans cette ambiance toute particulière qui, à travers une si parfaite harmonie, a su nous gratifier de tant d'onirisme (ne prenez pas cette expression au sens propre du terme mais plutôt avec du recul;)). Depuis peu, je remarque que les cinéastes coréens ont tendance à utiliser la pluie comme support émotionel (la sixième victime, friend etc...). Ils se sont peut-être passés le mot, qui sait! Quoiqu'il en soit, ça rend superbement bien et la scène en question s'en trouve largement renforcée (la scène du meurtre).

Tiens donc, je viens de constater que je ne vous ai toujours pas parlé des musiques donc ne croyez pas que je vais vous quitter aussi promptement, non mais! Etant un fan de ce genre de musique, je dois dire que j'ai été agréablement surpris. Certains thèmes sont vraiment surprenants, notamment celui de la fameuse rencontre à la morgue. Pour tout vous dire, j'ai chialé comme jamais auparavant (y'avait personne dans le ciné donc je ne me suis pas retenu^^). La scène en elle même était déjà triste au départ mais à grand renfort d'envolées lyriques, il m'a été impossible de résister à de telles prouesses. Je me suis laissé aller, comme le gros sentimental que je suis. Eh ouais, j'ai pas l'air comme ça, des fois, je péte des câbles, je dis des conneries à tout va mais en définitive, je suis quelqu'un de très émotif.

Bon, on va s'arrêter là. En tout cas, je pense avoir dis l'essentiel de ce que peux représenter failan à mes yeux et c'est pour toutes ces raisons que je vous encourage vivement à tenter cette expérience hors du commun. Pas la peine d'en rajouter, mon texte principal est assez explicite pour vous montrer que failan ne ressemble à aucun autre film et que de ce fait, il est inévitable de le manquer. J'affirme, sans une quelconque hésitation, qu'après avoir vu failan, votre façon de penser va changer du tout au tout... Vous voilà prévenus.
Allez, préparez les pop corns (et les mouchoirs, cela va de soit) et que le spectacle commence...

Très prochainement, je vous parlerai de friend, mon coup de coeur de l'année, avec failan, bien entendu;).

Jangzhaô

 
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